By Un texte de Rénald Boisvert
À ses 16 premiers combats chez les professionnels, Edgar Berlanga avait accumulé une fiche pour le moins impressionnante, soit 16 knockouts, tous au premier round. Cela a fait de lui une énorme tête d’affiche.
Or, à ses trois derniers combats, Berlanga a dû se contenter de victoires par décision. Même si ce celui-ci demeure un boxeur spectaculaire, plusieurs commentateurs ont commencé à entretenir des doutes sur ses chances de faire éventuellement partie des meilleurs de la division des super-moyens.
Au cours de son avant-dernier combat contre l’argentin Marcelo Esteban Coceres, Berlanga a même subi un knockdown au neuvième round. Il a dû trimer dur au dixième engagement pour faire bonne figure. Même si cette victoire était méritée, la performance du boxeur New-Yorkais n’a pas été à la hauteur des attentes.
Par conséquent, lors de son plus récent combat, le 19 mars dernier, dans l’espoir de redorer sa fiche, c’est un adversaire en principe pas très menaçant qu’on a voulu opposer à Berlanga, soit Steve Rolls, âgé de 37 ans. Or, le combat ne s’est pas déroulé comme prévu.
UN JEU DE JAMBE DIFFICILE À SOLUTIONNER
Dès le début du combat, il est apparu évident que Berlanga aurait beaucoup de misère à coincer son adversaire dans les câbles. Grâce à un excellent jeu de jambe, Rolls n’a jamais paru en difficulté dans ce combat. Et surtout, il a fait ressortir de nouvelles limitations chez la jeune vedette New-Yorkaise.
Un cogneur ne doit pas s’attendre à ce que tous ses adversaires s’immobilisent et veulent échanger coup pour coup. Notamment lorsque cet opposant excelle dans l’art de se déplacer, il est tout à fait logique que ce dernier utilise cette habileté pour déjouer la stratégie souvent unidimensionnelle du bagarreur.
Dans une telle situation, le cogneur n’a pas d’autre choix que de «couper le ring». Or, cette habileté est aussi un art. Et il faut savoir que l’habileté à «couper le ring» repose aussi principalement sur la mobilité. D’ailleurs à l’entraînement, le cogneur ne doit-il pas exécuter les mêmes drills priorisant le jeu de jambe? Cela n’a vraisemblablement pas été le cas de Berlanga.
Ce qui me fait croire que Berlanga n’attache pas beaucoup d’importance au jeu de jambes provient de l’un de ses commentaires d’après match. Au sujet de Steve Rolls, il a dit que ce boxeur ne cherchait qu’à s’enfuir au cours du combat parce qu’il avait peur. Pourtant, Rolls n’était jamais très loin si l’on tient compte des innombrables jabs avec lesquels il a touché Berlanga.
Personnellement, je crois que ce commentaire de Berlanga constitue une forme de déni à l’égard de sa contre-performance. La boxe a toujours été composée de cogneurs, mais aussi de techniciens qui utilisaient leur jeu de jambes dans le but de frustrer les bagarreurs. Le grand Muhammad Ali trône certainement au sommet de cette catégorie. A-t-on entendu Joe Frazier traiter Ali de fuyard? Pas du tout. Frazier a plutôt choisi de se lancer à sa poursuite, esquivant les coups grâce à des mouvements de tête et coupant le ring afin de créer des opportunités.
Pour revenir à Berlanga contre Rolls, je vous invite à regarder les rounds 6, 7 et 8 au cours desquels le boxeur de 37 ans est impressionnant. Loin de s’enfuir, Rolls réplique activement et donne une leçon de boxe à Berlanga.
Par conséquent, peu importe qu’un boxeur remporte ou non un combat, il doit d’abord reconnaître ses lacunes s’il veut vraiment pouvoir continuer à s’améliorer. Berlanga n’échappera pas à cette règle. Heureusement pour lui, il est entouré d’excellents entraîneurs. Ainsi, il aura l’opportunité de refaire ses classes. Mais pour y parvenir, il lui faudra certainement beaucoup de volonté et un peu d’humilité.
CONCLUSION
L’habileté consistant à «couper le ring» m’apparaît un sujet très intéressant à traiter. C’est véritablement un art. Avec toutes ses particularités et nuances, ce savoir-faire est cependant beaucoup plus complexe qu’il en a l’air. Ce sera le sujet de mon prochain texte.
