Les deux premiers mois de l’année 2023 ont passé, le premier gala d’Eye of the Tiger Management (EOTTM) aussi. Mais déjà, on sait que les prochains mois seront déterminants pour certains des quelque 20 boxeurs de l’écurie de Camille Estephan. Coup d’œil sur les « 12 travaux » du promoteur qui rêve de remplir le Stade olympique.
I – Le « Lion » en tournée mondiale
Depuis le retour de la pandémie, et même avant cela, EOTTM a fait d’Arslanbek Makhmudov l’une de ses principales têtes d’affiche, si ce n’est pas la principale. Cela a porté fruit, le « Lion » est maintenant classé 4e WBC, 5e WBA et 15e WBO. Toutefois, pour les quelques combats d’envergures qui le séparent du sommet, le Casino de Montréal commence à se faire petit. Une tournée chez nos voisins du Sud s’impose, surtout avec les gros sous de ESPN. Laurent Poulin a suggéré Martin Bakole, qui semblerait avoir des problèmes financiers. L’idée est succulente ; le Congolais devance même Makhmudov dans deux classements (2e WBA et 13e WBO)…
II – Mbilli : un championnat du monde en 2024?
Il est difficile de faire trop de projection avec « Solide », puisqu’il fera face à son plus gros test en carrière, soit le cogneur équatorien Carlos Góngora, le 23 mars prochain. S’il l’emporte, Mbilli sera plus près que jamais du combat de championnat du monde tant attendu. La situation des 168 livres n’est toutefois pas simple. Canelo Alvarez possède les quatre titres de la division et les fédérations semblent lui mettre aucune pression quant au choix de ces adversaires. Mbilli est déjà classé 2e chez la WBC, un combat pour le titre intérimaire face au gagnant du duel entre David Benavidez et Caleb Plant pourrait donc être l’option la plus probable, quelque part l’année prochaine…
III – Ramener les Tigres à la maison
Vous vous souvenez de Sadriddin Akhmedov? Depuis l’arrivée de la pandémie, il ne s’est battu que deux fois ; au Mexique et dans son Kazakhstan natal. Mehmet Unal en est un autre. Le talentueux Turc avait fait ses débuts et son second combat lors de l’été 2021 sur deux cartes d’EOTTM, au Mexique. Il n’est revenu sur le ring qu’en janvier dernier, encore au Mexique. Apparemment, Unal est en route. Le nouveau venu des Tigres, Jhon Orobio aussi, ce dernier pourrait même se battre avant la fin du mois de mars. On touche donc du bois pour qu’il n’y ait aucune complication, et surtout, qu’Akhmedov obtienne lui-aussi bientôt le feu vert…
IV – Rendre tout le monde heureux
Comme il est indiqué plus haut, EOTTM compte maintenant environ une vingtaine de boxeurs. Pour l’heure, six cartes sont prévues pour 2023, dont celle déjà passée du 2 février. Camille Estephan devra donc sans doute en organiser davantage ou/et faire boxer ces boxeurs ailleurs pour satisfaire tout le monde. On pense à Christopher Guerrero qui dit vouloir boxer au moins quatre autres fois cette année, Avery Martin-Duval qui aimerait reboxer en avril (alors qu’aucune carte n’est prévue) et même Wilkens Mathieu qui aimerait littéralement « boxer sur tous les shows ». Bref, des agendas chargés, surtout pour les jeunes boxeurs, sans un énorme bagage amateur, à ce stade de leur développement…
V – Oser, avec Erik Bazinyan
En 2019, Erik Bazinyan avait choisi de décliner un combat éliminatoire face à l’Australien Rohan Murdock, combat qui aurait pu lui mériter sa chance en championnat du monde face à Billy Joe Saunders, détenteur de la ceinture à l’époque. Aujourd’hui « Bzo » a 27 ans, 29 combats et est notamment classé 3e à la WBA. Il ne semble pas y avoir de combat facile menant au sommet de la division des 168 livres. Un combat contre le dangereux Cubain David Morrell Jr est risqué, mais sachant que Morrell Jr est plus jeune que Bazinyan, le temps n’est plus une excuse. J’aurais donc tendance à dire que c’est maintenant où jamais pour le natif de l’Arménie. En plus, alors que personne ne semble pas se précipiter aux portes pour affronter le Cubain, même une défaite pourrait non seulement être une expérience d’apprentissage pour le boxeur, mais aussi de bravoure aux yeux des amateurs…
VI – Raviver le Simon Kean Show
Simon Kean est une figure polarisante de la boxe québécoise. Il est l’un des rares n’ayant pas besoin d’un combat d’envergure international pour vendre des billets. Depuis la pandémie, cela tourne toutefois un peu aux ralentis, les blessures n’ont pas aidé, Karim Ouatah non plus, mais il est maintenant temps de redonner la scène au « Grizzly ». Même si cela pourrait aussi être intéressant, dans son cas, même pas besoin d’aller aux États-Unis, sachant qu’il peut vendre 5 000 billets à Shawinigan et sans doute encore plus à Trois-Rivières. Peu importe, ce qu’on veut, c’est du divertissement, la spécialité de Simon Kean. Bref, advenant une victoire face à Molina, un call-out ultime et spectaculaire à Tony Yoka serait du bonbon…
VII – Steven Butler, un combat à la fois
À l’époque, avec une alléchante offre de combat de championnat du monde au Japon et une montée au classement rapide, on est peut-être allé un peu vite avec Steven Butler. En 2022, il a effectué un combat de retour, deux performances éclatantes et un combat davantage « d’apprentissage ».
On l’oublie, mais il n’a que 27 ans, le même âge que plusieurs boxeurs élites n’ayant même pas encore tenté ou obtenu leur chance pour les plus grands honneurs. Butler est, de ses propres aveux, maintenant plus mature. Et puis, il a prouvé qu’il pouvait faire 10 rounds sans trop se fatiguer. Pour la suite, c’est de s’assurer qu’il continue son développement, qu’il acquiert tous les outils, sans presser le citron trop vite.
Ses prochaines performances et son niveau d’adversité nous indiqueront d’eux-mêmes lorsqu’il sera prêt pour une deuxième chance. Rien ne garantira que cela fonctionnera rendu-là, mais au moins, ses chances de réussir auront été maximisées. Je le répète, rien ne presse. À 160 livres, Golovkin est vieillissant, Lara est vieillissant et Jermall Charlo semble destiné à monter chez les super-moyens. En 2025, si tout se passe bien, cela pourrait donc devenir très intéressant pour « Bang Bang »…
VIII – Relancer Mary Spencer
La défaite fait partie de la boxe. Ce n’est pas la fin du monde. Certaines défaites sont toutefois plus difficiles à avaler que d’autres, du moins, que ce soit pour l’athlète que les amateurs. C’est un peu ce qui s’est passé avec Mary Spencer.
On l’a pratiquement vendu comme la version féminine d’Artur Beterbiev. Ce sont d’énormes souliers à chausser et la défaite surprise de Spencer face à Hermans a prouvé qu’elle n’était pas tout à fait « ça », du moins pas encore. Niveau promotionnel, il faudra peut-être changer son fusil d’épaule. Jusqu’alors, on parlait d’un éventuel combat face à Claressa Shields, mais maintenant on est en mode reconstruction ; accélérée, puisque Spencer a tout de même 38 ans. Il est clair qu’on semble loin de Shields, mais le style de Spencer demeure rare en boxe féminine. À lui seul, il devrait permettre de vendre des billets, sans doute même de remporter un titre mondial un jour. C’est vendeur de le faire, mais parfois, voir trop loin n’est pas mieux que de regarder en arrière.
IX – Un peu de résistance pour Alexandre Gaumont
Après son dernier combat, une victoire au premier round face à Carlos Gallego Montijo, Alexandre Gaumont semblait lui-même déçu de ne pas avoir pu boxer davantage. C’est parfois ce qui arrive avec les cogneurs, le développement est plus complexe, parce que la force de frappe à elle seule suffit parfois à faire la différence.
La « Fierté de Buckingham » a 27 ans, il aura aussi bientôt un deuxième enfant. La marge de manœuvre niveau développement est donc plus faible que pour un Mathieu, Martin-Duval, Guerrero, tous beaucoup plus jeunes.
Ainsi, cette année, Gaumont passera sans doute à des combats de huit rounds et pour s’assurer qu’il soit prêt à un jour s’y round, il devra éventuellement en boxer plus de quatre par soir. Cette lourde tâche reviendra surtout au matchmaker d’EOTTM, Stéphane Loyer, et elle sera cruciale pour la suite.
X – Plus de boxe locale, locale
C’était rafraichissant de voir boxer Alexandre Gaumont et Harley David O’Reilly à Gatineau. La foule semblait là pour eux et était là pour eux. On ressent la même chose quand Steven Butler se bat à Montréal ou Simon Kean se bat en Mauricie. Pourquoi ne pas en faire plus? Anthony Marcotte veut amener la boxe à Victoriaville, parfait. Marc Ramsay parle de Rouyn-Noranda, génial. Je lance une idée supplémentaire, pourquoi pas Thomas Chabot à Thetford Mines? Les amateurs exigent plus, alors aux vrais hommes d’affaires de voir si c’est faisable.
XI – De la charité dans le dossier Lexson Mathieu
Je suis assez mitigé sur ce dossier. Je prône beaucoup le « vivre et laisser vivre » et en mon sens, Lexson Mathieu peut faire ce qu’il veut. Je crois tout de même que tout le monde serait gagnant à un peu plus de clarté dans son départ mystérieux, même avec quelque chose qui ne clarifierait pas grand-chose.
Chez EOTTM, on l’a déjà dit, on ignore si Lexson Mathieu reviendra un jour, ce qui fait aussi que la porte pour un retour n’est pas totalement fermée. Une idée serait alors de crier cette incertitude « haut et fort » dans un communiqué. Sinon, trop de gens continueront à commenter « que se passe-t-il avec Lexson » chaque fois que Wilkens va se battre, une distraction inutile, pour tous les partis impliqués.
Ça me me rappelle un peu quand le Canadien de Montréal a dit pendant des mois que Carey Price était blessé « au bas du corps », tout le monde savait qu’il s’agissait de son genou et qu’on ne savait pas réellement quand il reviendrait. C’était surtout le silence ou le manque de transparence qui énervait les gens. Mais bon, je ne suis que journaliste, dans ce cas-ci chroniqueur, alors je laisse voir les vrais spécialistes de relations publiques voir si cela peut se faire.
XII – Du pain, des jeux et de la « merch »
Je me range finalement et une fois de plus derrière une opinion de Laurent Poulin. Les boxeurs aiment l’argent, les promoteurs aussi, alors peu importe qui, sans occupe, pourquoi ne pas vendre de la « merch » personnalisée de chaque tigre.
Junior Ulysse l’a fait lui et dans le petit monde de la boxe québécoise son logo, un énorme U rouge, est devenu symbolique. C’est d’ailleurs rendu l’uniforme officiel de Manny Montréal lors des galas de boxe. Pour ma part, j’ai déjà vu des hoodies personnalisés (et fort stylé) Team Butler, porté par l’équipe de Steven Butler, et je me suis dit que s’ils étaient vente libre, plusieurs trouveraient preneurs.
Je suis aussi allé à un show de lutte régional récemment, « Carnage hivernal », présenté par Au Sommet de la Lutte, dans une salle communautaire de Grenville. Il y avait environ 200 personnes, les lutteurs n’étaient pas tous des super-vedettes internationales, mais à l’entracte, leurs t-shirts se vendaient comme de petits pains chauds…
À méditer.
Crédit photo : EOTTM